
Par Hervé Roten
Né le 18 octobre 1928 à Oran (Algérie), dans une des ruelles animées du derb al yahoud (quartier des juifs), Maurice El Médioni a baigné dans la musique des cafés orientaux depuis sa plus tendre enfance. Son oncle, Messaoud Médioni, appelé Saoud l’Oranais, tenait un café-cabaret où il jouait du violon, composait et chantait, et dans lequel la chanteuse Sultana Daoud, qui prit plus tard le pseudonyme de Reinette l’oranaise, fit notamment ses débuts.

En tant que pianiste, Maurice est régulièrement invité par ses copains d’école pour animer les fêtes, les anniversaires. Mais le 8 novembre 1942, les Américains débarquent en Afrique du Nord. Doué d’un sens inné pour la musique, l’improvisation et l’accompagnement, Maurice, âgé de seulement 14 ans, fréquente les bars américains où il s’initie au boogie-woogie et à la country aux côtés des soldats afro-américains et texans. Il rencontre également des soldats portoricains qui lui apprennent la 
Un jour, vers 1947-48, « je joue au Café Salvat. Passent trois Maghrébins, des musiciens de rue avec derbouka, tambourin. Le soir, on joue ensemble. En quelques minutes le bar est bourré, la musique arabe vient de se marier avec le jazz et le cha-cha-cha ! » [2]Véronique Mortaigne, op. cit.
Avec ses amis musiciens – Hamida Guerbi, Amar Ben Amar et Kaddouri Bensmir -, Maurice assure alors l’animation du Café Salvat, qui ne désemplit plus… « Jusqu’au jour où le musicien Blaoui Houari lui propose d’intégrer l’orchestre oriental de l’Opéra d’Oran que dirige Mahieddine Bachtarzi. […] À la tête d’une société musicale, la Moutribia, Bachtarzi multiplie les échanges avec les autres pays du Maghreb. C’est ainsi que Maurice accompagnera bon nombre d’artistes tunisiens en tournée en Algérie. […] En France, j’étais très ami avec Raoul Journo, mais nous n’avons jamais joué ensemble ! Tous les musiciens tunisiens de Paris et de la région parisienne étaient mes amis: El Kahlaoui Tounsi, Maurice Meimoun … »[3]Raoul Bellaïche, « Maurice El Médioni, créateur du ‘pianoriental’ » – Entretien avec Maurice El Médioni, Je chante ! Magazine n° 1, janvier 2016, p. 61.

En 1961, Maurice El Médioni quitte l’Algérie pour émigrer en Israël où il séjourne quelques mois avant de s’installer à Paris en 1962 où il jouera parfois lors de fêtes, bar-mitsva ou mariages. En 1967, il décide de retrouver le soleil méditerranéen de Marseille où il ouvre un magasin de vêtements avec son frère. Parfois, sur demande expresse de Line Monty, il remonte sur Paris pour l’accompagner au piano.

En 1985, il cesse son activité de tailleur qu’il aura menée durant 42 ans afin de se consacrer entièrement à la musique. Il se produit alors régulièrement avec Reinette l’Oranaise, Lili Boniche ou Blond-Blond tout en conservant des liens privilégiés avec Line Monty.
Dans les années 1990, Michel Lévy, qui a racheté le catalogue Dounia à El Kahlaoui Tounsi, produit avec Bruno Barre plusieurs CDs de Lili Boniche, Blond-Blond, Reinette l’Oranaise, Line Monty, Luc Cherki, René Perez… dans une collection intitulée « Trésors de la chanson judéo-arabe » (Ed. Mélodie Distribution). Ces CDs, qui seront réédités plus tard par Buda Musique, remettent à la mode les artistes phares de la chanson francarabe ou franco-orientale, parfois accompagnés au piano par Maurice El Médioni ou chantant des œuvres de ce dernier. En 1992, le Festival Montpellier-Danse programme en soirée d’ouverture Line Monty, Lili Boniche et Reinette l’Oranaise. La carrière de Maurice El Médioni prend alors un nouveau départ, sur scène ou dans les studios d’enregistrement. En 1996, le label Piranha lui consacre un CD Café Oran – Maurice El Médioni et son PianOriental, où il joue notamment avec les Klezmatics. En 2000, il enregistre Samaï Andalou – 


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| 1 | Véronique Mortaigne, « Maurice El Médioni, le piano à l’arabesque », Le Monde, 27 juin 2003 |
|---|---|
| 2 | Véronique Mortaigne, op. cit. |
| 3 | Raoul Bellaïche, « Maurice El Médioni, créateur du ‘pianoriental’ » – Entretien avec Maurice El Médioni, Je chante ! Magazine n° 1, janvier 2016, p. 61. |
| 4 | Voir la captation de cette cérémonie sur Akadem |
| 5 | Notamment à Yvonne Kahan et Ava Bohbot (Chaos Film) qui sont en train de réaliser un documentaire, Notes of Exile, consacré à Maurice El Médioni. |



